analyse culturelle et études de genre / art, mythes et images

groupe de recherche coordonné par anne creissels et giovanna zapperi
docteures de l'ehess, chercheures associées au cehta

contact : annecreissels(at)orange.fr g.zapperi(at)gmail.com

séance du vendredi 11 avril 2008


Sandra Buratti, M2 EHESS, sandra.buratti(at)yahoo.fr

« 'Orientales bacchanales', images de la femme à la croisée des imaginaires antique et orientaliste dans la peinture européenne du XIXe siècle »

Issues d’une tradition fameuse, depuis les céramiques antiques en passant par Titien et Poussin, les bacchanales représentent Dionysos et son cortège de bacchantes, de satyres et d’animaux sauvages, adonnés à la célébration du vin et de la volupté.

Au XIXe siècle, la représentation de ces cultes et épisodes mythiques tend à réduire le nombre de personnages mis en scène jusqu’à réaliser des portraits de bacchantes. En outre, lorsque les peintures présentent des groupes, ceux-ci sont en majorité composés par des femmes. La représentation du dionysisme est véhiculée par un discours en images sur la femme. En effet, peindre la femme dans un contexte antique permet à certains artistes de déployer un imaginaire et un discours à visée sociale et politique, qu’il serait impossible de produire en utilisant un cadre contemporain. Or cette représentation de la femme dans un univers antique relaye un imaginaire qui converge étonnamment avec celui des artistes orientalistes. Il devient parfois difficile de distinguer la bacchante endormie, épuisée d’avoir trop dansé et célébré son dieu, de l’odalisque alanguie sur les coussins du harem.

On regardera ainsi deux tableaux de Corot qui présentent dans la même pose, le même costume et le même décor, une bacchante et une jeune Algérienne. Ce croisement Orient/Antiquité nous permettra ainsi d’évoquer – avec Corot, Gleyre et Alma-Tadema pour principaux exemples – les thèmes de la représentation du corps féminin à travers la danse, l’érotisme et l’animalité, en tentant de dégager la constitution de certains clichés et stéréotypes plaçant la femme dans un état de dépendance à la fois sexuel et mental.

Gustave Courbet, La Bacchante, vers 1844-1847, huile sur toile, 65 x 81 cm, Cologne, Rau Foundation