analyse culturelle et études de genre / art, mythes et images

groupe de recherche coordonné par anne creissels et giovanna zapperi
docteures de l'ehess, chercheures associées au cehta

contact : annecreissels(at)orange.fr g.zapperi(at)gmail.com

séance du vendredi 8 juin 2012



Marie Vicet, doctorante en Histoire de l’art contemporain à l’Université Paris Ouest Nanterre La Défense (EA 4414 HAR : Histoire des arts et des représentations) et à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (EA 2478 - LETA : Laboratoire d'Esthétique Théorique et Appliquée), marie.vicet(at)gmail.com 

« ‘Girls Rule, Kind of (Strategy)’: Girls Want Their MTV Too! Pratiques vidéo d’artistes féminines au regard de MTV » 

Depuis l’avènement de MTV en 1981 et la diffusion à grande échelle de clips vidéo dans le but de vendre encore et encore plus de disques, la femme, comme déjà en publicité, fut utilisée comme argument de vente, vue comme objet de fantasme pour le téléspectateur. Avec l’arrivée de la technologie vidéo, du mouvement punk et du mouvement de libération des femmes dans les années 1970, la revendication de la place de la femme en tant qu’artiste a explosé et c’est tout naturellement que les artistes plasticiennes ont dès le début des années 1980 proposé une autre vision de la femme au travers du clip vidéo ou une critique de son utilisation dans un but uniquement commercial. 

Le succès inattendu du titre « O Superman » de Laurie Anderson en 1981 lui donne la possibilité de passer sur MTV et ainsi de proposer une image de la femme loin des représentations qu’on y trouvait alors, les chanteuses féminines y étant encore rares. 

En 1982, l’artiste vidéaste Dara Birnbaum réalise un clip vidéo posthume pour la chanson Fire ! de Jimi Hendrix dans lequel elle transporte le thème de la chanson dans l’univers consumériste des fast-foods et met en question le statut de la femme consommatrice et consommée. En 1987, elle réalise une autre vidéo pour la chaîne MTV dans laquelle elle propose cette fois une image de la femme plus indépendante, qui décide par elle-même. 

De la même façon dans les années 1990, Sadie Benning, jeune artiste féministe qui ne se reconnaît pas dans les images véhiculées par la télévision propose une nouvelle vision de l’image de l’adolescente dans le clip de German Song qu’elle réalise en 1995 pour le groupe Come. En 1998, dans le clip vidéo d’Aerobicide qu’elle réalise pour Julie Ruin, projet solo de Kathleen Hanna, pionnière du mouvement du Riot Grrrl, Sadie Benning dénonce les campagnes de publicité destinées aux femmes pour les inciter à acheter tel ou tel produit. C’est dans la même veine critique qu’Elisabeth Subrin, vidéaste qui avait déjà collaboré sur d’autres projets avec Sadie Benning, réalise en 2002 le clip Well, Well, Well pour le Tigre, le nouveau groupe de Kathleen Hanna. 

En art vidéo, l’artiste Pipilotti Rist dès ses premières vidéos comme I’m Not the Girl Who Misses Much datant de 1986 reprend les codes du clip vidéo pour critiquer la culture populaire en jouant sur la technologie du médium vidéo. 

Il sera question ici de voir comment ces artistes féminines utilisant le médium vidéo se sont emparées d’une forme télévisuelle, le clip vidéo musical pour le détourner, le critiquer et ainsi proposer une image de la femme qu’elles ne retrouvaient ni à la télévision ni sur MTV, et qui ne leur correspondait pas.

Artbreak, MTV Networks, Inc. © Dara Birnbaum & Electronic Arts Intermix